Les douze travaux de Gérald (Besse)
Cave Gérald & Patricia Besse, Martigny-Les Rappes, Valais, Suisse
De Laurent Probst | 16 juillet 2011
Il y a un peu du héros grec Hercules en Gérald Besse, car l’un et l’autre ne sont pas homme d’un seul défi. Pour ce faire, il faut savoir puiser en soi une énergie peu commune.
Gérald Besse et son épouse Patricia ont créé il y a vingt-cinq ans, en partant d’un garage pour la première vendange, une cave de référence en Valais. Depuis, que de travaux entrepris ! Le domaine compte aujourd’hui 18 hectares de vignes, toutes en terrasses. Ces terrasses, où « tablards » demandent un travail inouï. On parle de près de 1500 heures de travail annuel pour un hectare de vignes en terrasses contre 500 ou 600 heures pour un vignoble mécanisé en plaine. Gérald Besse et son équipe sont devenus des experts pour démonter et remonter ces murs de pierres sèches sitôt que ceux-ci prennent un peu de ventre, signe de leur affaiblissement. Ce travail ils le réalisent à la fin de l’automne parfois, mais plutôt au coeur de l’hiver.
Des vins de terroir
Alors que la carte des vins comporte un nombre de cépages important (plus d’une quinzaine), Gérald Besse a imprimé sa volonté de vinifier et d’élever aussi des vins de terroir. Voila une chose somme toute encore assez rare en Valais, région dont la communication est souvent très axée sur des vins de cépage.
C’est le cas du gamay, avec trois cuvées, en effet la région de Martigny dans le coude du Rhône possède des sols granitiques particulièrement bien adaptés à ce cépage, et le chasselas (fendant) décliné lui aussi en trois cuvées. Dans les deux cas, ces vins très abordables sont absolument dignes d’éloges.
Des vins de cépages
Mais que serait le Valais sans ses cépages ? Ainsi au rayon des grandes réussites de cette cave, il faut citer un des cépages autochtones: la Petite Arvine ! Ce cépage emblématique du Valais est de surcroît planté ici à « grande échelle » : plus d’un hectare (il y en a 165 seulement dans le canton). Et l’on se bat pour chercher à en tirer un vin sec (ce qui est obtenu la plupart des années) et d’une grande finesse. Une cuvée flétrie existe aussi et se présente dans un registre où la finesse n’est jamais prise en défaut par la puissance, et où la fraîcheur aromatique du vin est respectée. Il en de même avec les vins des autres cépages, tous à un excellent niveau qualitatif.
Des vins bien élevés.
Qu’ils soient vins de terroir ou de cépage, il y a aussi de la place pour l’élevage. L’ensemble de ces derniers vins élevés en barrique se retrouvent sous la dénomination des « Serpentines ». Le cornalin (autre cépage autochtone) présente de la race, une très belle structure et du potentiel ainsi que la syrah (qui contrairement au cornalin existe également en version cuve). Je ne les citerai pas tous, mais j’évoquerai ici un dernier vin remarquable, l’Ermitage (cépage marsanne). Ce cépage rhodanien s’exprime à merveille en Valais.
Gérald Besse, rejoint par la nouvelle génération, bichonne ses ceps avec d’autant plus d’amour que les plus vieux, ont été plantés par son grand-père en 1955. Depuis quelques années, afin d’accentuer la fraîcheur de la riche matière de leur vin, les Besse ont décidé de ne réaliser que la fermentation alcoolique et renoncent à la seconde, dite malolactique. Il en résulte un vin particulièrement élégant, ciselé, destiné à une belle garde. D’ailleurs, cette cuvée a rejoint les vins de l’association Mémoire Des Vins Suisses, dont la vocation est de démontrer le potentiel de vieillissement des plus belles cuvées réalisées par les vignerons helvétiques.